Quelques vers au pas de l’œuvre de Pierre Torreilles

Algunos versos o pasos de la obra de Pierre Torreilles

 

J’ai choisi de venir auprès de chaque chose
 et de voir chaque jour se lever le silence.

 

Escogí venir cerca de cada cosa
Y ver cada día levantarse el silencio.

 


Nommer est-ce laisser au cœur de chaque chose
Eclairante et tardive, une lumière pour mourir ?

 


¿Nombrar es dejar en el corazón de cada cosa,
Luminosa y tardía, una luz para morir?

 


Tel le soleil à son lever avec le moindre dit l’obscur
L’énigme près du lieu le poète l’entend.

 


Tal el sol en su levante con lo mínimo dice lo oscuro
El enigma cercano al lugar, el poeta lo escucha.

 


Je dis que le silence est bleu, je crie
Pour éveiller son impatience
Dans mes yeux le pollen résonne comme l’or

 


Digo que el silencio es azul, grito
Para despertar su impaciencia
En mis ojos el polen resuena como el oro

 


Je dis qu’il est une parole entre les mots
arrachée et laissée aux choses qui s’éloignent.
Je dis que de sa forme émane le divin.


Digo que existe una palabra entre las palabras
Arrancada y dejada para las cosas que se alejan.
Digo que de su forma emana lo divino.

 

Je dis cet infini porteur de galaxies au fond de moi.
Incessante est la source en son murmure migrateur.
Mais de cela  qui ne parvient qu’à ton silence
De cette voix qui longuement médite sur ta voie 
mesure la distance et vient de l’autre rive
parle !

 

Digo ese infinito portador de galaxias en mi fondo.
Incesante es la fuente en su murmullo migratorio.
Pero de esto que llega sólo a tu silencio
De esa voz que largamente medita sobre tu vía
Mide la distancia y viene de la otra orilla
¡Habla!

 


Nommer est-ce laisser au cœur de chaque chose,
éclairante et tardive, une lumière pour mourir ?
un murmure peut-être, irisant sobrement
l’accueil silencieux de leur ténèbre ?

Ô mon esprit n’est plus à vouloir arracher
Mais à laisser venir dans l’ouverture de leur lampe
Les mots d’un sinueux parcours !

 

 


¿Nombrar es dejar en el corazón de cada cosa,
Luminosa y tardía, una luz para morir?
¿Un murmullo tal vez, irisando sobriamente
El acoger silencioso de su tiniebla?

¡Oh mi espíritu no quiere cosechar más
Pero sí dejar que lleguen en la apertura de su lámpara
Las palabras de un sinuoso recorrido!

 

 


Poids d’une abeille sur la fleur de sénéçon
En équilibre industrieux sous la gracilité du vent,
Coupe docile et frémissante…

 


Peso de una abeja sobre la flor de la yerba cana
En equilibrio industrioso bajo la gracilidad del viento,
Copa dócil y trémula …

 


Ce brin d’herbe têtu, capricieux comme une chèvre !
Il éveille au divin
Semblable à quelque jeu de mots,
Mise en place opportune et sereine.

 


¡Esta brizna de hierba testaruda y caprichosa como una cabra!
Despierta en lo divino
Semejante a ciertos juegos de palabras,
Colocación oportuna y serena.

 


Si dépouillant la mort
l’homme perd son éclat
ô ne refermez pas !
une saison l’a traversé…

 


Si despojando a la muerte
El hombre pierde su luz
¡Oh no cierre!
Una estación lo atravesó…

 


Archer du jour naissant
Le soleil bande son silence…

 


Arquero del día naciente
El sol arma su silencio…

 


Loin des valeurs repues
Dans l’éloignement des instants en terrasses
Se tient le neutre universel
Mesure hymnique familière
Dans le retrait des dieux bruyants que côtoyait l’enfance.

 


Lejos de los valores llenos
En el alejamiento de los instantes en terrazas
Se mantiene lo neutro universal
Medida hímnica familiar
En el retiro de los dioses bulliciosos que bordeaba la infancia.

 


Car celui que confine l’orage
Vers lui descend le pur silence
Sa parole brille, fragile.

 


Porque aquel que confina la tormenta
Hacia él desciende el puro silencio
Su palabra brilla, frágil.

 


La lenteur d’un oiseau lézarde le silence
Lumière encore, transparence,
La pensée douloureuse appelle sur le seuil.

 


La lentitud de un ave agrieta el silencio
Luz todavía, transparencia,
El pensamiento doloroso llama desde el umbral.

 


Une rose replie quelque absence
Laisse de tout discours où s’efforce l’écho.
Immobile lenteur des dieux visibles jusqu’au soir
Voici que se répand l’écho durable
La chair du monde nous murmure.

 


Una rosa replega alguna ausencia
Médano de todo discurso donde se aventura el eco.
Inmóvil lentitud de dioses visibles hasta entrada la noche
Ya se difunde el eco durable
La carne del mundo nos murmura.

 


S’éloigne claudiquant
par ses labours vertigineux
ce qui meurt,
ce qui est du temps.

 


Se aleja claudicando
Por sus labranzas vertiginosas
Lo que muere,
Lo que es del tiempo.

 


Mais s’il advient qu’un mot se tourne dans le vent
Fertile est à nouveau l’espace menacé.

 


Pero si ocurre que una palabra se torna en el viento
Fértil es de nuevo el espacio amenazado.

 

 


Outre midi
Voici que j’ai dessein de ne point renoncer
Ce qu’en moi porte à l’innocence
La hauteur où je marche
Le silence requis
Où se mêlent les voix de ces escarpements.

 


Más allá del mediodía
Tengo ya la intención de no renunciar
A lo que en mí conduce a la inocencia
La altura por dónde marcho
El silencio requerido
Donde se mezclan las voces de esas escarpas.

 


Où se vient amarrer le bleu
Scintille le regard effaré de la neige
Et dort en son reflet le vacarme intérieur.

 


Donde se viene a amarrar el azul
Centellea la estupefacta mirada de la nieve
Y duerme en su reflejo el estrépito interior.

 


Le temps miroite sans regard
La fêlure du monde hésite.
Le thrène aux jeux dansants
Riche de ses contradictions…

 


El tiempo espejea sin mirar
La brecha del mundo vacila.
El treno con ojos bailadores
Rico en sus contradicciones…

 


Car divin est le non caché
Qui plonge vers le haut
Jusqu’à l’écume du silence.

 


Porque divino es lo no escondido
Que se zambulle hacia lo alto
Hasta la espuma del silencio.

 


Les mots ne reprendront jamais
L’attente qui nous point
Mer morte où s’abreuvait
La horde des étoiles

 


Las palabras jamás proseguirán
La espera que nos punza
Mar muerto donde bebía
La horda de las estrellas

 


Cela qui est du cœur
Dans leur silence atteint
Les pierres l’étançonnent

 


Esto que es del corazón
En su silencio aquejado
Las piedras lo apuntalan

 


Résonance attendue
Les déambulations du cœur…

Surgeons du ciel
Nos deux voix, mains nouées,
L’une et l’autre le tout.

 


Resonancia esperada
El deambular del corazón…

Retoños del cielo
Nuestras dos voces, manos anudadas,
La una y la otra, lo todo.

 


Cela que nul ne dit
L’autour du cœur désaffaîté
L’immobile isolé
Sur nos lèvres contemplatives

 


Esto que nadie dice
Alrededor del corazón sesgado
Inmóvil aislado
Sobre nuestros labios contemplativos

 


Quand s’illimite l’apparent
Sous l’archet qui le sollicite
Repose en sa douleur
L’itérative vibration.
Sereine est en sa migration
La gravité qui nous déchire

 


Cuando ilimitado lo aparente
Bajo el arco que lo solicita
Reposa en su dolor
La iterativa vibración.
Serena está en su migración
La gravedad que nos desgarra

 


Les dieux se sont hissés sur les terrasses du silence
Et scintille leur fondation

 


Los dioses se izaron sobre las terrazas del silencio
Y destella su fundación

 


Là commence ce qui s’achève
Ces jours
Ecumes au goût d’algue
Qui m’ont pris par la main dans mon fouillis d’étoiles
Hors des mailles jetées
Dans le fatras des filets éblouis.

 


Allí comienza lo que se termina
Estos días
Espumas con sabor a alga
Que me cogieron de la mano en mi revoltijo de estrellas
Fuera de las mallas echadas
En el fárrago de las redes deslumbradas.

 


Ô berges enfouies !  lents échassiers du songe !
Voici vos floraisons d’iris aux rostres d’améthystes !
Mémoire accumulée, la vase aux odeurs d’algue, aux écailles de sel

 


¡Oh, riberas enterradas! ¡ Zancos lentos del ensueño!
¡He aquí sus florescencias de iris a los rostros de amatistas!
Memoria acumulada, el limo con olores de alga, con escamas de sal

 

La Voix désabritéé / La Voz desabrigada

VOIX / VOZ DE PIERRE TORREILLES

 

PIERRE TORREILLES

Après des études de théologie et de lettres Pierre Torreilles participe durant la seconde guerre mondiale à la Résistance dans les maquis du Vercors, de la Haute Loire et de l’Aigoual. A la libération il habite Montpellier et publie de nombreux ouvrages, souvent des livres d’artistes ou des livres d’art avec ses amis peintres : Olivier Debré, Tal Coat, Louis Cordesse, Yves Picquet, Jacques Clauzel, Thierry Le Saec et Enán Burgos…

Pierre Torreilles, internationalement connu pour son amour et sa défense du livre, a toujours doublé sa vie publique de grand libraire d’une recherche poétique passionnée et exigeante.De 1953, date de son premier recueil, « Solve et Coagula » paru aux éditions GLM, à « Ressac » paru aux éditions Fata Morgana avec des peintures d’Enán Burgos en février 2006, ses œuvres se sont succédées sans discontinuer, couronnées de nombreux prix.

Enracinée dans le paysage camarguais de son enfance, nourris par la lumière de la Grèce autant que de la Haute Provence, la poésie de Pierre Torreilles laisse surgir un monde familier et précis transmuté par le langage. En effet seule cette transmutation obtenue par ascèse, regard et écoute mêlés, permet, l’espace d’un instant, celui du poème, le surgissement de l’être même des choses.

Poésie de grand large qui ne craint pas le recours aux mots rares, la mise en question de la syntaxe et exige un travail du regard pour mieux saisir la progression du sens entre le blanc des espacements et les îlots noirs des mots, l’écriture de Pierre Torreilles cherche moins à dire le monde qu’à retrouver le lieu inaugural de tout dire, où la parole devient prophétique et se saisit  à la racine d’un silence primordial. « Margelle » du langage, entre louange, célébration et interrogation angoissée.

Pierre Torreilles né en Camargue, le 21 mai 1921.
Mort le 22 février 2005 à Montpellier.

 

PIERRE TORREILLES

Terminados sus estudios de teología y de letras, Pierre Torreilles se alistó en la Resistencia durante la segunda guerra mundial, en los montes de Vercors, de la Haute-Loire y del Aigoual. Después de la liberación se instaló en Montpellier y publicó numerosas obras, como también muchos libros de artistas o libros de arte, con sus amigos pintores: Olivier Debré, Tal Coat, Luis Cordesse, Yves Picquet, Jacques Clauzel, Thierry Le Saec y Enán Burgos…

Pierre Torreilles, conocido internacionalmente por su amor y su defensa del libro, paralelamente a su vida pública de gran librero, mantuvo siempre su búsqueda poética apasionada y exigente. Desde 1953, fecha de su primer poemario, " Solve y Coaguló " publicado por la casa editorial Gallimard, hasta "Resaca" su libro último publicado en febrero del 2006 por la editorial Fata Morgana, con pinturas originales de Enán Burgos, sus obras se sucedieron sin interrupción, galardonadas con numerosos premios.

Arraigada en el paisaje Camargués de su infancia, alimentada a su vez por las luces de Grecia y de la Alta-Provincia, la poesía de Pierre Torreilles deja surgir un mundo familiar y preciso transmutado por el lenguaje. En efecto, sólo esta transmutación obtenida por ascesis, mirar y oír mezclados, permite el espacio de un instante, el del poema, el surgimiento del ser mismo de las cosas.

Poesía de un alto mar sin temor a recurrir a palabras raras, la puesta en tela de juicio de la sintaxis, le exige un esfuerzo a la vista para obtener mejor la progresión del sentido, entre el blanco de los espaciamientos y los islotes negros de las palabras. La escritura de Pierre Torreilles, sin tratar de enunciar el mundo, explora el lugar inaugural de todo decir, donde la palabra se vuelve profética, aferrada a la raíz de un silencio primordial. "Margelle" / "Ribete" del lenguaje, entre oda, celebración e interrogación angustiada.

Pierre Torreilles nació en Camarga el 21de Mayo de 1921.
Murió en Montpellier el 22 de Febrero del 2005.

 

 

 

 

Principaux ouvrages / Principales obras / de 1953 à 2006

*
° "Solve et coagula" - Guy Levis Mano, 1953
° "Mesure de la terre", "Medida de la tierra" - GLM 1961
° "Voir", "Ver" - Ed du Seuil, 1968
° "Le désert croît", " Crece el desierto" – Ed du Seuil, 1971 – Prix de l’Académie Française
° "Denudare" – Gallimard, 1973, réédition 93, poésie Gallimard
° "Menace innominée", "Amenaza innominada" – Grasset – 1976 – prix international de Nice
° "Pratique de la poésie", "Práctica de la poesía" – gravure d’Olivier Debré – Montpellier, Fata Morgana
° "Les dieux rompus", "Los dioses rotos" – Gallimard – 1979
° "La voix désabritée", "La voz desabrigada" – Gallimard, 1981
° "Territoire du prédateur", "Territorio del depredador" – Gallimard, 1984
° "Margelle du silence", "Ribete del silencio" Gallimard, 1986
° "Parages du séjour", "Parages de la estancia" – Grasset – 1989
° "Venant à stance", "Viniendo en estancia" – Gallimard, 1990
° "Où se dressait le cyprès blanc", "Donde se levantaba el ciprés blanco" - Gallimard, 1992
° "Ce qui heurte à nos mots", "Lo que choca con nuestras palabras" – Fata Morgana, 1998
° "La semence de l’eau", "La semilla del agua" – Ed Rougerie, 1998
° "Quelque chose qui vient de loin", "Algo que viene de lejos" – Ed Rougerie, 2000
° "Où se vient amarrer le bleu", "Donde se viene amarrar el azul" – Ed Tipaza, Cannes
° "Echardes de lumière", "Astillas de luz" – Fata Morgana, 2001 – peintures de Louis Cordesse
° "Chants de la lumière et de l’énigme",
"Cantos de la luz y del enigma" – Fata Morgana, 2003 – peintures de Jacques Clauzel
° "Ressac", "Resaca" – Fata Morgana,  2006 – peintures d’Enán Burgos

A paraître en février 2011, Fata Morgana, textes rassemblés : "Pratique de la poésie", "Où se vient amarrer le bleu", "Echardes de lumière", "Chants de la lumière et de l’énigme", "Ressac".

La editorial Fata Morgana, publicará en febrero del 2011, una antología que reunirá varios poemarios ya publicados por dicha casa : "Práctica de la poesía", "Donde se viene amarrar el azul", "Astillas de luz", "Cantos de la luz y del enigma", "Resaca".

 

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Peinture d'Enán Burgos pour le poème "RESSAC" de Pierre Torreilles
Pintura de Enán Burgos para el poema "RESACA" de Pierre Torreilles

 

Hommage à Pierre Torreille, Mediathèque Emile Zola, Montpellier, 1

Homenaje a Pierre Torreille, Biblioteca Emile Zola, parte1

Hommage à Pierre Torreilles, Mediathèque Emile Zola, Montpellier, 2

Homenaje a Pierre Torreilles, Biblioteca Emile Zola, Parte 2

Nous tenons spécialement à remercier Simone Torreilles, de nous accorder sa confiance, et de nous donner le droit de publier ce texte dans notre site.

Un especial agradecimiento para Simone Torreilles, por habernos concedido su confianza al autorizarnos la publicación de dicho texto en nuestra página.

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10 / 12 / 2010